Sur Daniel Darc (2)

Voici un autre très beau texte de Daniel Darc qui se trouve sur le verso de la pochette de "Quelqu'un Comme Toi"

" Je ne sais pas si tout ça a un sens. Le train roulait trop lentement, et le compartiment était plein de monde. Comme toujours. Un coupe à l'accent belge distribuait de la monnaie à une jeune fille illuminée. "Le bureau de change sera certainement fermé et de toutes façons il y aura le queue." Ca m'a fait rire. Je veux dire, cette phrase n'avait aucun sens !  La conversation s'est arrêtée là, et ils m'ont tous regardé comme si etc... Etc... Le lendemain matin, je me suis réveillé au milieu d'un salon gigantesque. Il y avait des murs blancs, de la moquette beige, une bande de chats tigrés, un poste de télévision allumé, une émission médicale, des disques de folklore japonais, un beau garçon à lunettes, une photo de Sal Mineo, une fille un peu trop maigre et une tasse de thé. J'ai grommelé quelques mots d'une façon si indistincte que je ne les ai pas compris, la fille a glissé un sourire quelque part sous ses yeux, m'a tendu la tasse de thé et un poste de téléphone dont je ne soupçonnais pas l'existence. J'ai appelé celle que j'aimais ce jour-là, elle était fatiguée. "Rappelle-moi-demain-tu-veux-bien ?" J'ai pensé à Conan Doyle : " C'est l'amour d'une femme qui constitue l'histoire d'un homme". Quelque part, "Rodney Stone" est bien plus tragique que... * Je ne sais pas pourquoi je te parle de tout ça, mon frère. Je ne sais pas pourquoi je te parle de tout ça, parce que tu n'es plus mon frère. Je ne sais pas pourquoi je te parle de tout ça, parce que tu n'as jamais été mon frère. Tu as voulu l'être, quelquefois. J'ai cru que tu l'étais, souvent. Mais nous ne parlions jamais des mêmes choses. Je jetais ce que tu collectionnais, tu riais de ce qui me faisait pleurer. La fin a commencé quand je t'ai donné "L'Attrape-Cœur". Tu n'as jamais pu le lire jusqu'au bout. D'ailleurs, quand je t'en avais parlé, quelques mois plus tôt, tu t'étais moqué de loi en croyant que j'écorchais le nom d'une œuvre de Boris Vian. Comment peut-on écorcher quelque chose de celui-là ? Je ne t'en veux pas, tu as sans doute quelque part, simplement tout ça ne m'intéresse plus. Faux amis, faux objets, fausse violence, fausse ivresse. "... Quelque chose qui déjà s'enfuit irrévocablement." Je préfère plutôt parler de Phoebé avec cette fille perdue à l'autre bout du Monde. Elle me comprend peut-être... En retour, mon frère, ne m'en veux pas non pus ; je te dis adieu parce qu'il n'y a rien d'autre à faire. Si je te croise dans la rue, ne me crois pas trop fier pour te regarder, simplement, je ne te vois même plus. Tu retournes d'où tu viens, et je n'ai jamais su où c'était. Tu retournes d'où tu viens, et je n'ai jamais su où c'était. Tu retournes d'où tu viens, et je n'ai jamais su..."

* inscrivez ici n'importe quelle œuvre du répertoire russe, ça n'a pas d'importance.