Strideur apparaît à Nice en 1979 autour des deux frères Nègre : Michel à la basse et Pierre à la guitare, passé auparavant par un groupe nommé Dentist. Le projet se met réellement en place en 1980, lorsque deux nouveaux musiciens rejoignent la formation. D’abord Patrick Fargeas, ex-Riviera Boys, qui remplace Patric Pelletier à la batterie. Puis Charles Loupiac, qui apporte avec son clavier — un des tout premiers synthétiseurs monophoniques disponibles localement — une nouvelle dimension harmonique. Les répétitions se déroulent alors dans un espace minuscule, à peine plus grand qu’une roulotte, ce qui donne au groupe une allure de romanichels du rock niçois, bricolant leur son dans des conditions plus que spartiates.
Strideur multiplie ensuite les concerts dans les night-clubs de Nice, notamment au Findlater’s, ainsi que sur les scènes universitaires de la Côte d’Azur. Le groupe finit par monter à Paris pour jouer une semaine complète au Gibus, avec Patrick Coutin à la sono, bien avant qu’il ne devienne célèbre. L’ambiance est électrique et décousue ; un homme prétendant être le chanteur de Killing Joke finit même par s’inviter sur scène un petit matin pour un bœuf improvisé, anecdote parfaite de ces nuits parisiennes où tout pouvait arriver.
Le groupe signe ensuite avec Underdog, le label de Marc Zermati et Dominique Lamblin, et enregistre en août 1980 au Marcadet Studio. Leur unique disque, un maxi 45 tours quatre titres intitulé 13, sort en janvier 1981. Après sa publication, ils quittent leur local minuscule pour une vaste salle désaffectée du Bar des Amis, juste en face des abattoirs de Nice. C’est là, dans une atmosphère brute et sans artifices, qu’ils enregistrent deux titres restés inédits à l’époque : « Pays Sous Hypnose » et « Rolls Royce Noire », une adaptation du « Big Bad Cadillac » de Kim Fowley.
Les concerts se poursuivent : le 11 avril 1981 à la MJC Gorbella de Nice, puis en juin sur la scène du Théâtre Bobino lors d’un festival rock réunissant des groupes français comme les Dogs ou les Flambeurs, mais aussi des artistes internationaux tels que les Cramps et Wilko Johnson. Ils ouvrent également pour Lili Drop, avec deux rappels et les félicitations d’Olive. Le groupe enregistre encore d’autres titres et en envoie un échantillon à Underdog, mais ne reçoit plus de retour. Le silence s’installe, et la séparation — du label comme du groupe — survient à la fin de l’année 1981.
Strideur disparaît ensuite aussi rapidement qu’il avait émergé. Reste leur maxi, quelques archives dispersées et la mémoire de concerts qui témoignent d’une scène locale bouillonnante, inventive et trop souvent invisible. L’essentiel des informations qui permettent aujourd’hui de retracer leur parcours provient du formidable travail de documentation de Cameleon Records. Un immense merci à Claude Picard pour son effort constant à sauver de l’oubli des groupes qui, sans lui, seraient définitivement perdus.